Ethiopie


En 1948, Henri Chomette participe au concours de l'Union internationale des architectes avec le soutien financier de l’Unesco pour le Palais Impérial de l'Ethiopie. Ce concours avait pour finalité la construction, sur la plus haute colline d’Addis-Abeba, d’une résidence pour le Négus Haïlé Sélassié Ier, dernier empereur d’Éthiopie (1930-1936 ; 1941-1974). Cent treize architectes, ingénieurs ou groupes de techniciens participèrent, dont Henri Chomette, qui fut classé deuxième. Les trois projets lauréats reçurent une récompense de 15 000 dollars du gouvernement impérial éthiopien.

Henri Chomette s'installe en Ethiopie l'année suivante. Il est nommé architecte en chef de la ville d'Addis-Abeba, la capitale de l'Ethiopie. Il occupe cette fonction de 1953 à 1959.

Parmi ses constructions, outre le Palais Impérial (1948), il réalise la Banque Nationale (1953) et la Banque Commerciale (1965), ainsi que l'Université d'Addis-Abeba.

Le Palais Impérial  (1948)



Chomette proposa un projet de palais qui se voulait traduire « dans l’espace et dans la matière les données psychologiques d’une civilisation »

L’édifice, conçu en fonction du nombre d’or, s’étend sur 40 762 mètres carrés, répartis sur huit étages de béton et de pierre de taille. Les volumes s’organisent autour de la « salle des cent colonnes » – vaste salle hypostyle de 4 800 mètres carrés – et sont dominés par le volume vertical qui abrite la salle du trône. Cette dernière comprend un immense arbre généalogique en bronze forgé, dont la racine constitue le siège d’Haïlé Sélassié et dont les feuilles, faites de dalles serties de béton, racontent en lumière colorée l’ascendance impériale. La dynastie salomonide – dont Sélassié fut le dernier régnant – se réclamait en effet descendante de Ménélik Ier, personnage que la légende désigna comme étant le fils du roi Salomon et de la reine de Saba. Sur toute la hauteur de la façade du volume accueillant le théâtre est représenté, enfin, le lion de Juda, emblème animalier de la royauté éthiopienne.


Plan de niveau du projet de Palais Impérial à Addis-Abeba en Éthiopie (archives des BEHC).


Maquette du projet de Palais Impérial à Addis-Abeba en Éthiopie (archives des BEHC).

À la fin des années 1940, le projet de palais pour le Négus constitua le premier contact d’Henri Chomette avec l’Afrique. L’architecte œuvra par la suite à de nombreuses reprises à Addis-Abeba, dont il fut nommé en 1953 architecte et urbaniste conseil. Chomette réalisa notamment dans la capitale éthiopienne l’opéra-théâtre Haïlé-Sélassié, inauguré en 1955 à l’occasion du jubilé d’argent du Négusle siège de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) vers 1965, l’église de la congrégation évangélique de langue allemande, consacrée le 20 juin 1966, et l’immeuble de l’assurance impériale

La Banque Nationale d'Ethiopie (1953)
La Banque Commerciale d'Ethiopie (1965) 

C'est l'une des deux banques d'État éthiopiennes, avec la Banque Nationale d'Ethiopie.



La Banque Commerciale d’Éthiopie (archives des BEHC).


Son siège, situé sur Churchill Road à Addis-Abeba a été inauguré en 1965.



Le bâtiment de la « Commercial bank of Ethiopia », rappelle la maison traditionnelle de la région du Choa, celle d'Addis-Abeba, le toukoul, d'où cette forme circulaire.

Le siège de la Banque Commerciale d’Éthiopie fut certainement la réalisation majeure de l’architecte à Addis-Abeba. Faisant face à l’opéra-théâtre Haïlé-Sélassié et à l’immense Lion de Juda réalisé en 1954 par le sculpteur premier grand prix de Rome Maurice Calka (1921-1999), l’édifice fut inauguré par l’empereur le 16 novembre 1965


Le lion de Juda et la banque commerciale d’Éthiopie (archives des BEHC).

Conçu avec la collaboration de l’architecte Romain de Seela, le bâtiment abrite la Banque Commerciale d’Éthiopie, l’une des deux banques d’État du pays. Construit en 3 ans et 8 mois, il se compose de deux volumes, l’un, vertical, qui abrite l’administration, l’autre, hémisphérique, qui accueille le hall. L’ensemble, conçu selon le nombre d’or, est en béton armé, les huisseries en aluminium et les sols en marbre.


Dôme du hall de la Banque Commerciale d’Éthiopie (archives des BEHC).

D’un diamètre de trente-trois mètres, le hall est constitué d’un emboîtement d’éléments triangulaires en béton dont la taille se réduit graduellement du sol vers le sommet du dôme et qui sont clos par un vitrage afin de donner une « ambiance de plein air ». La forme circulaire du volume peut faire référence aux « toukouls », les habitations traditionnelles rurales.



Banque Commerciale d’Ethiopie à Addis-Abeba
Mais surtout, les éléments de béton triangulaires évoquent, comme le souligna la presse, des pétales de fleurs, Addis-Abeba signifiant en amharique « Nouvelle Fleur ». Ce hall hémisphérique « en forme de fleur » fut, lors de sa construction, l’objet de spéculations et de critiques. Henri Chomette souligna même les réticences de la maîtrise d’ouvrage à propos de cette référence trop manifeste à la tradition. Auprès du gouverneur de l’institution, l’architecte justifia alors l’emploi de la demi-sphère comme étant une référence au Capitole de Washington.

Pourtant, comme le nota Chomette, l’inscription de l’édifice dans la culture éthiopienne était évidente :
Avant l’informatique, quand un client s’adressait à un employé du guichet, derrière celui-ci, deux agents vérifiaient, après trois enregistraient, suivis de quatre tenant les livres, puis cinq tapaient et classaient les ordres et documents. Comme dans la découpe des fromages, pour une unité d’intervention, l’espace nécessaire se traduisait donc par un triangle. Pour vingt unités, ces triangles, assemblés autour de l’espace public, avaient dicté un anneau circulaire pour la commodité du Hall.


Or, par une synergie des gestes inverse, la vieille tradition copte a, depuis des temps immémoriaux, abouti à cette forme ronde pour les églises populaires. Dans toutes les campagnes d’Éthiopie elles illustrent le paysage. Le Saint des Saints ponctuel au centre est entouré de l’anneau des prêtres. L’enceinte des catéchumènes, plus nombreux, l’entoure. La foule des fidèles complète le cercle.


Billet de dix dollars éthiopiens, à gauche l’immeuble de la Banque Commerciale d’Éthiopie inauguré en 1965 à Addis-Abeba, à droite le Négus (archives des BEHC).

L'Université


Le Théâtre National
Ethiopian National Theatre




Le lion de Juda devant le Théâtre National


Le Lycée franco-éthiopien Guebre-Mariam



Le siège social de Philips
Philips Headquarters Office Building




Le siège social de Philips est un immeuble de bureaux de quatre étages conçu par le Bureau d’études Henri Chomette (BEHC). Suite à la proposition de l'empereur Haile Selassie d'accueillir la nouvelle organisation africaine à Addis Abeba, la ville subit une importante réforme urbaine dans les années 1960. Henri Chomette était l'un des architectes de premier plan à Addis Abeba dans les années 50 et 60 et a conçu de nombreux bâtiments post-modernes dans la ville. Le siège social de Philips, commandé par ses propriétaires néerlandais, a été construit entre 1965 et 1967. Il a été inauguré par l’empereur Haile Sellasie I le 17 avril 1967.

Le pavillon de l'Ethiopie à l'Exposition Universelle de 1967


Pavillon de l’Éthiopie pour l’Exposition Universelle de 1967 à Montréal au Canada (archives des BEHC).

L’architecte conçut également le pavillon de l’Éthiopie pour l’Exposition universelle de 1967 à Montréal. Malgré son ampleur, le travail d’Henri Chomette en Éthiopie constitue un des pans les plus méconnus de sa carrière.